Une Petite Table à l'Ecart....

Lundi 11 Juin 16h07

"Non, non Milady, nous sommes arrivés, regardez l'enseigne..."

Niles désignait en pointant du doigt une enseigne qui représentait Big Ben.

"Je vous en pris, entrez... dit il tout en tenant la porte pour laisser passer Eighy. Venez vous asseoir, j'ai réservé la meilleur table!"

La table était légèrement à l'écart du reste de la salle, mais suffisament en vue pour que personne ne puisse supposé que l'on veuille se cacher.
Seules les paroles étaient inaccessible au reste de la salle.

Le serveur tirant la chaise pour permettre à Eighy de s'asseoir, Niles lui fit un signe de tête en guise de salut.

Peu après le patron arriva avec les cartes.

"Mlle, enchanté de vous accueillir dans mon humble établissement! Mr Byrought, quelle joie de vous revoir!"

Sur les cartes était représenté une mapemonde avec des dizaines de petites affichettes indiquant le nom, l'origine et le type de thé que l'on pouvait se faire servir...

Après quelques minutes passer à observer la carte...

"Avez vous arretez votre choix sur un thé en particulier, mademoiselle Eighy???"

"Je pense pour ma part m'orienter sur un Wu Long torréfié.... un Fujian fera l'affaire! Et vous??..."

16 h 08

Eighy passa devant Niles. On les dirigea vers une table à l’écart qui offrait une vue magnifique sur toute la pièce et permettait une conversation privée. Son compagnon semblait avoir ses habitudes dans la place… ah, bien sûr, il avait dit « des amis anglais, originaires du Yorkshire ».
Eighy s’assit sans vraiment réaliser que quelqu’un lui tirait la chaise. Puis elle prit machinalement la carte tendue par le patron et s’abîma dans sa contemplation sans la voir. Elle était encore préoccupée par l’incident des tomates et elle espérait que Walter sortirait indemne de son altercation avec la mégère qui semblait prête à le crucifier sur place. Et c’était sans compter les heures de travail pour nettoyer et faire reluire la voiture avant la sortie au Zénith… Elle prendrait un taxi s’il le fallait et Walter conduirait le maître plus tard.

Elle cligna des paupières et sortit de sa rêverie quand Niles lui demanda si elle avait choisi son thé. Dommage… une bière aurait été bien meilleure, mais bon! Et puis, elle n’y connaissait rien en thé. Mais quand même, elle avait appris qu’il fallait y mettre un nuage de lait OU un soupçon de citron, jamais les deux. Elle réprima une petite grimace de dégoût au souvenir des grumeaux qui flottaient à la surface quand, voulant bien paraître, elle avait versé avec fort gestes élégants un filet de lait dans son thé citronné… Le majordome de ses hôtes avait changé sa tasse en présentant mille excuses pour la tache qu’il avait soudainement aperçue sur sa soucoupe. Un homme vif et diplomate, elle l’aurait embrassé! Personne n’avait rien vu, sauf son beau blond qui lui avait pincé moqueusement le genou sous la nappe. Le domestique avait été embauché discrètement et avec une large marge d’augmentation par le maître quelques jours plus tard.

Eighy leva les yeux de la carte. Niles la regardait, il attendait toujours sa réponse. Un thé à la menthe, bien concentré et sucré comme seuls savaient le faire les Libanais, ça irait? Hum… ici, rien n’était moins sûr… Mais les sablés appétissants qu’elle avait aperçus en entrant sur une table près de la fenêtre, ça, elle n'allait certainement pas en faire son deuil. Elle arbora son plus charmant sourire :

Je me fie à vos judicieux conseils, Niles. Un thé délicat, mais magnifiquement parfumé et… un brin sucré, que me suggérez-vous?

Son compagnon replongea avec attention le nez dans la carte et lui présenta ainsi sans le savoir le sommet de son crâne. Elle se demanda si l’épaisseur de ses cheveux était naturelle ou rapportée. Cette idée loufoque la fit pouffer et elle dissimula bien vite son rire dans une petite toux en détournant le regard. Et elle tomba pile yeux dans les yeux avec le serveur qui s’approchait. Flûte! Il fallait espérer que personne ne pouvait lire dans ses pensées...

11 Juin – 16 h 09 min.

Il avait vraiment besoin de l’argent que lui rapportait ce boulot pour bosser ici. Deux mois à servir le thé à ses vieilles peaux décaties et râleuses. Il n’aimait pas les vieux, mais heureusement avait un sens aigu de l’accueil.

Madame Donovan, Mademoiselle de Pary, vous êtes pimpantes aujourd’hui, quelque élixir de jouvence de votre secret ? Installez-vous là ! Comme d’habitudes ? Un Coeur de Pekoe à fleur d'amarante rose et un Rooibos Kilimandjaro ? Je vais vous chercher ça.

Tiens voilà le gars Byrought. Ouch !!! Et bien accompagné, il fait ça comment ? Sa nièce ou sa fille… que regarde-t-elle ? Ah ! J’en prends bonne note.
Ah oui, il a réservé cette table :

Bonjour monsieur Byrought ! Mademoiselle, permettez- moi ! Prenez place !

Un grand sourire, un léger signe de tête et je repars, il faut abreuver les pies.

Shawn (c’est, en tout cas, ce qui est marqué sur son badge) disparut et revint quelques minutes plus tard avec les perles qu’étaient les thés demandés. Enfin, si l’on est consommateur, bien sûr.

Pardon mademoiselle de Pary ? Les sablés, hélas, vous m’en voyez navré, ce sont les derniers et d’ores et déjà commandés. Je vous recommande la pâtisserie du jour… oui ? Deux ? Je vous fais porter cela.

A nous maintenant… il prit l’assiette de sablés et se dirigea vers la table de l’habitué. Ses yeux rencontrèrent ceux de la jeune fille. Il sourit sans les lâcher et déposa les biscuits plus près d’elle que du papy. Un rapide coup d’œil. Merveilleux, pas d’alliance :

Avec les compliments de la maison ! Avez-vous fait votre choix ?

16h11

Eighy lâcha à la dernière seconde les yeux du serveur pour les poser sur l’assiette de sablés qu’il venait de déposer sur la table. Un geste réflexe lui fit aussitôt lever la main vers les gourmandises, mais elle réalisa la bévue qu’elle allait faire. Elle connaissait pourtant les bonnes manières! Mais, là, maintenant, la surprise de voir apparaître comme par magie l’objet de sa convoitise la perturbait un peu… à moins que ce soit les yeux légèrement moqueurs qui… pouvaient lire ses pensées et ses désirs secrets…!?!?! Non! Impossible ça!

Son choix? La question lui permit de dévier à la dernière seconde la main tendue vers les sablés pour pointer un doigt au hasard sur la carte que Niles continuait de détailler minutieusement :

Que pensez-vous de celui-ci, Niles?

Puis elle leva les yeux vers son compagnon de table. La prochaine fois, elle l’inviterait pour une bière, ça serait plus simple… Bon, les deux hommes la regardaient, elle avait dit une bêtise? Mauvais choix? Autant s’enliser comme il faut, ça ne serait pas pire… Elle ajouta avec un sourire :

Je dois vous avouer franchement que je n’y connais rien en thé, mais absolument rien… si ce n'est qu’on peut y tremper les biscuits…

Était-ce l’éclair furtif d’un regard scandalisé de Niles, mais qu’il avait su dissimuler rapidement et avec courtoisie? Zut! Elle ajouta précipitamment :

Mais il ne faut pas les tremper trop longtemps… ils ramollissent et… tombent… au fond…

Elle eut du mal à terminer et laissa la fin de sa phrase en suspens en fermant les yeux.
Quel calvaire ce salon de thé!

Lundi 11 juin 16h13

"Ce thé??? Comme tout ceux sur la carte, il est merveilleux!"

Voyant le malaise d'Eighy devant quelque chose qu'elle ne connaissait pas, Niles se détendit et se dit que finalement il n'impressionnerait pas la demoiselle avec un thé dans un salon bien tenu!

"Vous savez, ce qu'il y a de bien dans le fait de boire le thé dans un salon de thé aussi parfait, c'est qu'ils ont un Brandy tout aussi parfait... peut etre qu'après nos thé..... Pour ce qui est de tremper le biscuit dans le thé, je dirais que..... ça dépend.... selon la nature du biscuit, il y en a qui tiennent beaucoup mieux que d'autres!!!"

Niles se fendit d'un large sourir et se détendit dans sa chaise, s'appuyant sur son dossier de façon non chalante. Il souleva l'assiette de biscuit de la table et la présenta à Eighy pour l'encourager a se servir...

11 Juin – 16 h 16 min.

Les formidables yeux verts sombres de la jeune fille quittèrent ceux presque ébène de Shawn. Sa main fine et délicate se leva pour finalement rester en suspension une demi seconde avant de continuer sa route jusqu’à la carte.
À sa charmante bourde, il put réprimer son sourire, mais ses yeux durent briller d’une moquerie somme toute bon enfant. Non seulement, elle était loin de ses vieilles pimbêches momifiés, mais en plus elle semblait apprécié le thé autant que lui.

Mais vers quoi allait sa préférence ? Alcool fort ? Léger ? Ou bien encore Bière ?

Lorsqu’elle parla de biscuit, Shawn se retourna. Un sourire s’étirait sur son visage, elle était merveilleuse. Il regarda les femmes décaties, dans l’espoir de reprendre contenance. Mais, elle continue sur sa lancée. Tremper, ramollissent et tombent au fond.
Il toussote, masquant son ricanement, tout en se penchant pour ramasser un papier imaginaire tombé au sol.

Tremper, aller au fond et ramollir… cette formule était intéressante aussi…

Ayant repris le contrôle de lui-même, il se retourna pour voir l’assiette présentée à la demoiselle. Il reprit sa place, droit comme un I, il semblait que sa question n’aurait pas de réponse immédiate, qu’importe. Le plus beau spectacle depuis trop longtemps s’offrait à lui.
Tout sourire, ne la quittant pas des yeux, il se mit en devoir d’attendre.

Lundi 11 juin 16h20

"Je n'ai qu'un seul patron, Maitre Jimenez... et malheureusement je ne suis pas autorisé à parler de lui ou de ses projets, je préfère vous le dire franchement, c'est une règle que nous avons instauré il y a bien longtemps devant un verre de vin, si vous voyez ce que je veux dire..."

Un verre de vin qui contenait du sang, et ce pour la troisieme fois de la semaine, juste après le retour du maître en ville.

"Mais de quel concert parler vous, celui donner par Didier Tosca.... je ne sais plus! Avec la jeune soliste promut il y a peu, Sabine Rousseau je crois!"

Lundi 11 juin 16h25

"Ce n'est pas que ce soit une question d'état que de dire si mon maitre va ou non ce soir au concert, c'est juste que je suis dans l'impossibilité de vous dire quoi que ce soit à son propos..."

Niles irrité par les propos d'Eighy, il attendit que le serveur reparte et se mis comme elle a enchaîner les phrases tout en restant le plus calme du monde... le fameux flegme anglais...

"ensuite je ne voulais pas paraitre malpolie en abordant directement des sujets comme votre âge, vos expériences ou bien tout autres choses vous concernant vous et votre maître, j'adore la couleur et la forme de vos yeux et bien que ce soit là une des raisons qui m'ont fait vous inviter en dehors d'avoir le plaisir d'être avec un belle femme, je suis également ici pour apprendre, ici ou ailleurs le lieu me va, les gens peuvent entendre des bribes de phrase avec les mots chauve souris, sang ou je ne sais quoi encore, ils restent persuadés que la personne est soit folle soit qu'elle plaisante. De plus je me fiche de ce que les autres personnes pense de moi, le chauffeur ou bien les gens dans ce salon de thé, le serveur ici présent ne s'y connait pas plus que vous en thé, et pourtant il travail ici depuis pas mal de temps, c'est un incompétent comme il y en a beaucoup sur cette terre, vous comme moi sommes aux services d'homme qui changent la face de ce monde, nous ne pouvons nous permettre la médiocrité! Vous suivez votre maître depuis combien de temps???? Surement beaucoup plus longtemps que moi! Je dirais meme que vous avez connues de grandes persécutions religieuse, vu votre crainte a vous dévoilez aux yeux de quelques personnes, mais ce n'est pas toujours le moins voyant que l'on remarque le moins!! Les personnes qui cachent trop de choses sont souvent faciles à remarquer! Nous ne sommes pas des pestiférés, encore moins des lépreux forcés de se cacher! Enfin pas tous!"

Sur ces derniers mots Niles eut un petit sourire, il avait ouïe dire par son maître qu'un lepreux vivait dans les égouts de la ville.

"Enfin pour ce qui est du temps je n'en ai rien à faire! Et pour ce qui est de la promotion de Sabine Rousseau, je l'ai appris par le directeur de l'opéra qui nous a appelé ce matin pour nous annoncé le changement de programme"

"Maintenant que les choses sont claires et sans mal entendu, accepteriez vous mes excuses pour le lieu de notre rendez vous qui était mal choisit, ainsi que pour m'être emporter à l'instant!"

il se rassit dans le fond de sa chaise pris un gateau et le trempa dans son thé! Raté pour raté, autant faire comme à la maison!

16h28

À mesure que Niles parlait, le sourire d’Eighy s’élargissait. À la fin, quand il trempa son sablé dans son thé, elle était absolument ravie :

Niles, vous êtes charmant! Vous vous êtes emporté? À peine… Il n’y a absolument rien à pardonner. Et puis vous avez réussi à me mettre à l’aise!

Elle pointa sa bouchée trempée suspendue au-dessus de sa tasse qui dégouttait doucement dans son Fujian. S’il ne la mettait pas à l’instant dans sa bouche, elle allait tomber et asperger la table.

Vous êtes doué. Sans reprendre votre souffle, vous avez réussi à me complimenter, à louanger l’existence de nos maîtres ainsi que notre dévotion envers eux. Enfin, vous avez deviné et pardonné dans l'instant mes craintes secrètes et mes incertitudes… oui, j’ai vécu des périodes troublées, vous avez raison.

Elle souleva sa tasse et but une longue gorgée du liquide brûlant :

Maintenant, grâce à vous, je ne serai plus aussi nulle que je l’étais concernant le thé. Ce lieu n’était pas si mal choisi. Vous savez, les apprentissages et les possibilités d’évolution ne se trouvent habituellement pas aux endroits qui nous sont confortables, ce serait même plutôt l’inverse, je vous dirais. Mais enfin, je suis heureuse de votre compagnie, sincèrement. Et si vous connaissez le directeur du Zénith, cela veut dire que nous aurons peut-être la chance et le plaisir de nous croiser en soirée.

Elle mit machinalement une mèche de cheveux dans sa bouche et ajouta, soudainement perplexe :

Vous croyez vraiment que ce Shawn n’en connaît pas plus que moi sur le thé?

Un cri aigu, une chaise repoussée brusquement, le patron qui se précipite : une des dames assises près de la porte semblait avoir renversé sa tasse. Quand Eighy reporta son attention sur Niles, elle réalisa que le chahut avait couvert les propos de celui-ci :

Pardonnez-moi, vous disiez?

lundi 11 juin 16h31

"Vous croyez vraiment que ce Shawn n’en connaît pas plus que moi sur le thé?"

"oui absolument certain, il est incapable de conseiller sur les thés les plus fins!"

Au meme moment une des vieil... des habituées renversait son thé...

"Pardonnez-moi, vous disiez?"

"je disais qu'il est incapable de conseiller sur les thés les plus fins! Mais ça n'en reste pas moins un brave garçon! Mais revenons en a vous. Racontez moi un peu votre vie, vous disiez avoir vécut des periodes troublées..."

11 Juin – 16 h 34 min.

Il avait repris son service, non sans laisser traîner ses oreilles du côté de la table. Il avait ainsi appris que la douce jeune femme n’était pas non plus enthousiasmée par les alcools forts. Peut-être la bière, il faut dire qu’une Strong Ale Anglaise a autrement plus de pêche qu’un thé pour anglais au trou du cul bouché, ou encore une Trappiste, telle que la Chimay Rouge.

Il y eut une petite montée d’adrénaline à la tablée, légère, non identifiable par des gens ne regardant pas. Shawn ne s’en occupa pas, pas plus que de tout autre problème, le patron lui avait bien dit de ne jamais intervenir, sauf si la violence pointait. Comme avec cet énergumène qui avait giflé sa femme devant tout le monde, quel plaisir de lui avoir fait goûter le goudron du trottoir.

Madame Richmond, une nouvelle tasse de thé, vous nous voyez désolé pour la hanse mal essuyée. Vous n’avez plus besoin de rien ? Bonne fin d’après midi !

Et voilà, seize heure trente passée, il est temps de décoller.

Il jeta un œil à la table de l’anglais et de sa belle… il ne savait toujours pas quoi. Mais, une chose était certaine, trop de vous et de distance pour qu’il parte sans rien tenter. Il passa dans l’arrière boutique. Il en ressortit trois minutes plus tard et reparu avec son bombardier marron et son casque intégrale.
Il profita que le patron glisse la note sur la table, pour glisser un mot sous la tasse de la jeune femme. Ce faisant, il la gratifia d’un sourire charmeur et d’un clin d’œil complice.
Puis, d'un pas serein, quitta le salon.